Diagnostic correct pas toujours aisé
Le professeur G. Decoster nous raconte une histoire qui lui est arrivée et finit son histoire par une conclusion sous forme de conseil très utile au technicien.C’était une Ford Fiesta 1,4 TDCi de 2003 affichant 88.000 km qui nous rappela, qu’au temps des systèmes électroniques complexes qui équipent les véhicules, il faut non seulement maîtriser l’appareil diagnostic, mais également l’usage d’un multimètre conventionnel, d’un oscilloscope et des données techniques
(valeurs de consigne et schéma électrique du véhicule). Ils constituent le fondement de la recherche de panne.
Un chef d’atelier que nous connaissons nous demanda de l’aide pour une plainte d’un client concernant un ‘’fonctionnement irrégulier du moteur pendant la phase de montée en température’’, après que les collègues aient déjà procédés au remplacement de la pompe haute pression et des injecteurs ainsi que du capteur de pression du rail sans que cela n’apporte d’amélioration.
La première chose, fut de se faire expliquer, ce qui les avait poussés à remplacer ces pièces appartenant au circuit haute pression. Le collègue nous expliqua qu’après le démarrage à froid, le moteur fonctionne de manière irrégulière et qu’après avoir parcouru une courte distance, le boîtier de gestion passe en mode dégradé tout en commandant l’illumination du témoin « EAC FAIL » du bloc compteur. Par contre, dès que le moteur aurait atteint sa température normale de fonctionnement, il tournerait de manière tout à fait normale. Lors du relevé des codes défauts, le code P002, indiquant une pression faible dans le rail, reviendrait à chaque fois. De plus, des relevés dans les (valeurs réelles) à l’aide de l’appareil diagnostic Ford IDS auraient montrés que, lorsque la température de liquide de refroidissement se situe sous 41 °C, la pression du carburant varie entre 120 et 140 bars. Dès que la température dépasse 41 °C, le moteur tournait à nouveau de manière irréprochable et la pression de carburant dans le rail remonte à 320 bars. C’est pourquoi, après avoir vérifié le circuit basse pression, il fut procédé au remplacement des pièces précitées du circuit haute pression.
Après un bref contrôle visuel, nous décidions de relever quelques signaux de la gestion moteur sur l’oscilloscope.
La pression fluctuante de carburant apparaissait à nouveau mais d’autres signaux également ne livraient pas de valeur constante. Le signal de commande de l’électrovanne de recirculation de gaz d’échappement variait entre 10 et 57 %, la quantité de carburant variait entre 5 et 17 mg et la masse d’air aspirée variait également entre 8 et 13 g/s.
Nous débranchions, moteur tournant, le connecteur du débitmètre d’air (MAF). Dès ce moment, le moteur tournait à nouveau de manière irréprochable et la pression dans le rail remontait à 320 bars. Les autres valeurs ne variaient plus non plus et le taux de recirculation de gaz d’échappement tombait à 0 %. Dès que le connecteur était rebranché au capteur MAF, la pression dans le rail chutait immédiatement à 140 bar, accompagné d’un fonctionnement moteur irrégulier.
Les dires du collègue, que le moteur tournait de manière tout à fait normale, dès que la température normale de fonctionnement était atteinte se confirmaient également.
On procéda alors au remplacement à l’essai du capteur MAF – sans résultat. Sur base des données récoltées jusque là, j’excluais un défaut mécanique ou dans le circuit hydraulique. J’étais plutôt d’avis qu’il pourrait s’agir d’un problème de calibration de boîtier de gestion. D’après l’IDS le boîtier de gestion avait été programmé avec la dernière version de logiciel. Etant donné qu’il est fort compliqué de reprogrammer un calibrage antérieur, je décidai de remplacer à l’essai le boîtier de gestion par un boîtier de gestion provenant d’un véhicule d’occasion. Après que le mécanicien ait effectué les programmations de l’antivol (programmation des clés) dans le boîtier de gestion, le véhicule pouvait être démarré avec l’autre boîtier de gestion à calibration antérieure. Quelle ne fut pas ma déception lorsque le mécanicien m’informa que le problème était toujours présent, car j’étais convaincu que c’était la calibration qui causait le fonctionnement irrégulier du moteur.
Bien que le chef d’atelier avait déjà fait inspecter le faisceau électrique, je fis démonter complètement le faisceau moteur. J’étais visiblement soulagé lorsque le mécanicien me montra plusieurs endroits près du connecteur principal, où des frottements avaient abîmés les câbles (Figure 1).
Après avoir remplacé le faisceau moteur, nous ne pouvions masquer notre dépit, car le moteur ne fonctionnait toujours pas régulièrement.
Figure 1 : Le faisceau principal dans le compartiment moteur présentait plusieurs traces de frottement du à la protection en plastic cannelé (à droite).
Nous n’avions donc d’autre choix, que de reprendre tout à zéro. La procédure suivie : afin d’exclure tout problème dans le circuit basse pression, une alimentation indépendante fut raccordée sur la pompe haute pression. Ensuite les valeurs nominales et réelles de l’électrovanne de régulation de pression et de l’unité de dosage furent contrôlées à l’oscilloscope. Ce faisant, nous constations qu’elles ne correspondaient pas aux valeurs prescrites par l’usine.
Nous avons alors remplacé le capteur de température de liquide de refroidissement du moteur par une résistance variable, afin de constater si la pression dans le rail variait en changeant la valeur de température de liquide de refroidissement. Etant donné que tout ceci ne nous avançait guère, la vanne EGR fut obturée à l’essai à l’aide d’une tôle. Sur l’outil de diagnostic nous pouvions toujours observer les mêmes variations des données, alors que le taux de recirculation de gaz d’échappements ne pouvait plus faire varier la masse d’air aspirée. Une nouvelle fois le connecteur du capteur MAF fut débranché et la pression de rail revenait à une valeur normale.
J’étais prêt à jeter le gant et à abandonner la recherche complexe, afin de ne pas faire s’élever encore plus les frais de diagnostic. Je décidai donc de dormir dessus et voir la suite le lendemain. Comme cette panne ne me laissait pas de repos, arrivé à la maison, j’étudiai une nouvelle fois le schéma électrique de plus près. Ce faisant, je remarquai, que le capteur MAF, l’électrovanne de recirculation de gaz, l’électrovanne de régulation de pression et l’unité de dosage étaient alimentés par le même fusible F12 (Figure 2). Le fusible F12 pour sa part, était alimenté par l’intermédiaire du relais de boîtier de gestion, qui alimente en même temps le boîtier de gestion moteur par le fusible F13. Puisque j’avais contrôlé l’alimentation du boîtier de gestion, je pouvais exclure une chute de tension au relais du boîtier de gestion.
image 2 : Extrait du schéma électrique de la gestion moteur d’une Ford Fiesta 1,4 TDCi
Le lendemain matin, j’appliquai directement mes réflexions de la veille. Pour cela, je raccordai provisoirement un câble supplémentaire à l’alimentation du capteur MAF. La mise en route du moteur fit s’afficher directement une pression de rail au ralenti correcte de 320 bars. Dès que l’alimentation supplémentaire était supprimée, la pression du rail retombait. Comme il fut constaté par la suite, du jeu au support du fusible F12 était la cause de la chute de tension. J’en conclu qu’à l’avenir, lors d’une recherche de panne, je contrôlerais non seulement l’alimentation du boîtier de gestion mais également l’alimentation des capteurs et actuateurs.
G. Decoster